Comment décrypter les émotions des chevaux ?

Comprendre les émotions des animaux, c’est le travail de Léa Lansade, éthologue à l’unité Physiologie de la reproduction et des comportements à INRAE de Tours. Avec des protocoles originaux, Léa parvient à décrypter les émotions des chevaux et d’autres animaux d’élevage dans l’objectif d’améliorer le bien-être animal.

Publié le 15 septembre 2025

© INRAE / Christophe Maitre

Quand les chevaux regardent des films au cinéma

Comment savoir si un cheval va bien ou non ? Reconnait-il nos visages ? Nos voix ? Ces questions interrogent les professionnels de l’équitation et bien sûr les particuliers pratiquant l’équitation ou détenteurs de chevaux soucieux du bien-être de leurs animaux. Pour répondre à ces questions, Léa Lansade a mis en place un protocole original : faire visionner au cheval des films sur grand écran et observer ses réactions ! « Cette expérience avec des vidéos, c’est une première ! Cela permet de tester de manière totalement standardisée et sans biais le comportement des chevaux et de décrypter leurs émotions. » 

Pour savoir si un cheval reconnait les émotions humaines, Léa a observé les réactions de l’animal lorsqu’il voit ou entend des personnes en colère sur un écran de cinéma. Résultat ?  Le cheval est tout à fait capable d’associer un visage en colère avec une voix en colère, ou un visage joyeux avec une voix joyeuse. Cela provoque également chez lui une réaction émotionnelle. À partir de ces résultats, Léa et son équipe ont développé une intelligence artificielle capable de reconnaître l’émotion d’un cheval avec une précision de 90 %. Une innovation qui permet de mieux identifier les signes de bien-être ou de mal-être, et d’en informer éleveurs, sportifs et passionnés.

Une autre expérience est menée pour découvrir si le cheval est sensible aux odeurs humaines. L’idée est de recueillir les odeurs de personnes qui regardent des films d’horreur ou des comédies. Au préalable on leur glisse des compresses sous les aisselles que l’on récupère à la sortie de la salle et que l’on fait ensuite sentir aux chevaux dans des tests standardisés. Le résultat est bluffant, ils les reconnaissent et y réagissent instantanément : les odeurs humaines liées à la peur, par exemple, effraient les chevaux alors qu’il ne se passe rien d’effrayant dans leur environnement au moment de l’expérience. 

Ça ne s’arrête pas là ! Les scientifiques ont réussi à montrer que les chevaux étaient capables d’associer des voix à des visages ! Comment ? En faisant visionner au cheval 2 vidéos en même temps : l’une d’un visage d’enfant et l’autre d’un visage d’adulte, tandis que l’on diffusait une unique voix, soit celle d’un enfant, soit celle d’un adulte. Grâce à des caméras, le comportement des chevaux et leur temps de regard vers chacun des écrans a été observé et leur fréquence cardiaque était mesurée pendant l’expérience. Les chevaux ont réussi à associer les traits d’un visage d’enfant à une voix d’enfant et les traits d’un visage adulte à une voix d’adulte. Cette étude a permis également de montrer que les chevaux réagissaient davantage aux voix d’enfants.

Et pour les autres animaux ?

Si les chevaux réagissent particulièrement bien aux émotions des humains, qu’en est-il pour les autres animaux d’élevage ? Sur le site de Nouzilly d’INRAE, Léa et son équipe ont accès aux veaux, vaches, moutons, poules…  Ils commencent à tester leurs protocoles sur les vaches. Ils utilisent les mêmes expériences que pour les chevaux en faisant visionner aux vaches des films avec différentes émotions humaines. Déjà, la chercheuse observe que les vaches sont très intéressées par les films et semblent y réagir émotionnellement. 


Un objectif commun à ces travaux : améliorer le bien-être des animaux 

Ces travaux intéressent une diversités d’acteurs, les professionnels des différentes filières, les éleveurs, les agriculteurs, les clubs sportifs, les particuliers… dans un objectif commun, améliorer le bien-être des animaux d’élevage. « On sait que le plus gros levier pour la bien-traitance des animaux c’est de sensibiliser les différents protagonistes à la sensibilité de l’animal. Comment détecte-t-on qu’un cheval ou qu’une vache va bien ou pas ? Si on a conscience de cela, on ne manipule plus les animaux de la même façon », explique la chercheuse qui mène de nombreuses actions de sensibilisation auprès des acteurs concernés.

Contacts

Léa Lansade

Ethologue

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